samedi 25 septembre 2010 VERS UNE VRAIE VIE POLITIQUE

Les Québécois sont gens merveilleux et sages. Ils fabriqueront un jour des journalistes et des politiciens de grande classe. Pour l'heure, ils y travaillent par une stratégie magnanime et conçue pour le long terme: le laisser-faire, le désintérêt apparent.

Et, ils maintiennent leur stratégie malgré les sermons divers qu'on leur adresse. Voyons voir quelques-uns de ces discours à leur intention.

Selon plusieurs intellectuels et journalistes, mes concitoyens seraient « cyniques » à l'égard de la politique. Et on entend par là non pas le sens convenu dans les dictionnaires usuels, mais une attitude répréhensible et fataliste, celle qui consiste à dire: « y a rien à faire », « on ne peut rien y changer », « c'est sale et c'est comme ça ».

Et pourtant, telle n'est pas la pensée qui nous anime. Je crois plutôt que mes concitoyens sont lucides et qu'ils ne veulent pas mettre la main à quelque chose qui s'effondre. Ils se protègent sainement et attendent leur heure ou encore que le bon sens vienne à prédominer après le séisme de cette démocratie d'apparat. Entre temps, il est vrai, la vie politique s'effondre de plus en plus et s'écroule sur elle-même. Et nous pensons, savez-vous, que ce séisme pourrait nous débarrasser de tant d'aberrations! J'y reviendrai sous peu, quelque peu.
Mais alors, n'y aurait-il pas une application plus juste du terme de « cynique »? Que diriez-vous si on l'utilisait pour les politiciens qui ont asservi nos institutions communes aux fins de leurs petits amis et de leur gloriole personnelle. Voici le dictionnaire à mon appui:
CYNIQUE, adjectif. Sens 1 : Relatif à une école de philosophes grecs qui rejetaient les conventions sociales et cherchaient un retour à la nature [Histoire]. Sens 2 : Qui ignore délibérément les convenances, qui a des opinions contraires à la morale.

Or ce sont bien les politiciens qui ignorent délibérément les convenances et la morale et non mes concitoyens. Par exemple, mes concitoyens conviennent que le gouvernement est une institution qui devrait servir le bien commun alors que les politiciens actuels servent leurs petits amis, les contributeurs à la caisse du parti; ou, encore,nous croyons qu'un premier ministre doit se consacrer au service de son peuple, alors que celui-ci « sert deux maîtres à la fois » sans qu'il daigne nous l'avouer de lui-même (75, 000$ de salaire versé en catimini par une entreprise privée, partisane, ''lobbyiste'' et 150 000$ provenant de nos taxes communes); ou encore nous voulons avoir un gouvernement commun pour une société organique et supportante pour chacun alors que les journalistes utilisent, après une élection, des termes insensés, quoique fondés de « gouvernement libéral » ; ou encore nous pensons que l'Assemblée nationale est le lieu pour légiférer pour toute notre société (nous sommes habitués dans notre travail et dans nos familles à faire équipe parce que nous avons des buts communs et des projets qui nous rapprochent), mais la pratique politicienne en a fait le lieu d'une guéguerre de cow-boys où les uns prétendant être « bons » traitent les autres de « méchants » et que ces « autres » prétendant être « bons » disent des « uns » qu'ils sont les « méchants ». Les politiciens ne savent pas que nous préférons la tévé pour goûter de tels spectacles ( et ils sont bien meilleurs ces films romancés!) qui nous rappellent notre enfance sans souci; etc., etc., etc..

M'est avis que ce sont les politiciens qui sont « cyniques » et je souhaiterais que les journalistes de tout acabit cessent d'utiliser ce terme à mauvais escient. L'attribuer aux bonnes personnes et bonnes situations aiderait à y voir plus clair. Ici manifestement, on doit comprendre ce que la psychologie nous apporte: il s'agit d'une projection. Ou, plus simplement, comme nous le savons par notre sagesse populaire : « celui qui le dit, est celui qui l'est! ».

Un autre discours est fait sous la forme d'un sermon que répètent de bonnes âmes peinées par la situation qui prévaut. On nous enjoint alors d'aller voter, d'utiliser notre pouvoir citoyen, de participer à la vie publique. De tels discours doivent faire du bien à ceux qui les font. Cela leur donnerait bonne conscience que je n'en serais pas surpris. Mais...

Je crois que mes concitoyens québécois réagissent avec leur « bon sens » en s'abstenant de participer aux votations et qu'ils s'abstiendront davantage dans l'avenir prochain. C'est la même sagesse traditionnelle qui nous faisait s'opposer à la conscription parce que la cause de la guerre n'était pas pour nous une bonne cause. Élire des représentants qui ont les comportements qu'ils ont est une farce déplorable et n'y pas participer c'est se garder d'une pollution évitable. Ne pas voter accélère le processus de désintégration en place. Pour ceux qui aiment la lecture enivrante, trouvez dans votre bibliothèque de quartier et lisez le roman de José Saramago, LA LUCIDITÉ qui décrit une situation d'avenir – les citoyens de toute une ville se sont largement abstenus de voter et ont enrayé la « démocratie ». Wow! Quel visionnaire! Et lucide, ma foi. Vous serez soit confortés dans votre intelligence non-participative ou, éclairés dans une nouvelle perception.

Un autre discours fréquemment entendu consiste à proposer des réformes. Réforme des règles de nomination des juges (cela s'en vient); réforme du mode de scrutin qui deviendrait plus proportionnel; réforme de la « période de questions » ou du rôle des dépités d'arrière-bans à l'Assemblée nationale; réforme du financement des partis politiques; réforme de la carte électorale; réforme...réforme...

Nos concitoyens savent que réforme est maquillage, chirurgie esthétique, traitement par « photo shop ». Ils attendent plus que des réformes ou autre chose qu'une réforme. Ils savent par leur sagesse populaire que « les règles, c'est fait pour être contourné!». (Leur premier ministre les contourne, tout le monde le fait, fais-le donc.... Non!) Ils en ont assez. Ils veulent des changements dans les façons de faire, de penser, d'agir. Un vrai changement de paradigme du type : « yes, we can! » mais qui prendrait vraiment racine dans la réalité. Un paradigme qui met au rancart les politiciens actuels de ruelles, la partisanerie qui salit périodiquement leurs poteaux de téléphone et les magouilleurs de Wall Street ou de la construction ou...et qui nous propose quelque chose de droit, de transparent, de complexe, de vrai...

Pour ma part, le quotidien des nouvelles m'amène depuis plusieurs mois à penser que nous serions mieux dans notre vie citoyenne sans la présence des partis politiques. Tiens, je les convertirais en lieux de développement d'idées sur l'organisation de la vie sociale. Après tout, ils nous ont fait croire qu'ils étaient capables de créer des programmes de développement de la société. (Programmes qu'ils ne réalisent surtout pas lorsqu'ils sont au pouvoir et qu'ils pourraient maintenant proposer à notre considération dans une période plus calme.) Il est temps qu'ils livrent la marchandise. Mais je ne leur permettrais plus de toucher à de l'argent ou de financer quiconque veut présenter sa candidature ou de participer à une élection. Je les placerais en amont des périodes électorales pour enrichir notre perception des problématiques sociales et nous proposer des solutions. Finies leurs guéguerressss! Et les citoyens politisés à nouveau pourraient s'inspirer de cette nouvelle intelligence de ces chercheurs de solutions!

Plus de partis politiques traditionnels et nous serons alors libérés des catégories simplistes et primitives qu'utilisent encore nombre de journalistes: « droite » et « gauche », «  rouge» ou «  bleu » ou «  vert »; nous serons libérés de la menace de ces groupes qui, une fois élus parce qu'ils ont plus d'argent que leurs adversaires, asservissent l'État (à tour de rôle, en fait) et sa gouvernance à leurs propres fins ; nous serons peu à peu libérés de la corruption au bénéfice des petits amis; nous serons libérés du spectacle désolant d'une Assemblée nationale dont les membres travaillent les uns contre les autres sans se soucier de nous. Ces représentants travailleront ensemble parce qu'il vaut mieux s'associer pour progresser sur des questions complexes (et la complexité caractérise la vie et la vie en société). Nous pourrons alors croire que nous construisons ensemble. Et le mot « politique » pourrait sortir de l'ornière boueuse dans laquelle il se trouve et retrouver sa noblesse : celle de l'intérêt de la vie commune dans la cité.

Ah! j'allais oublier : que ferons-nous des lobbys qui magouillent en coulisse pour infléchir la gouverne droite que nous attendons de la part de nos élus? Alors là, j'ai une belle proposition. Ayant aboli les partis politiques dans leur forme actuelle, j'abolirais également les lobbys dans leur forme coulissière actuelle. Je propose qu'une proportion significative des sièges de l'Assemblée nationale soit occupée par des personnes désignées par les divers groupes d'intérêt qui composent notre société. Finie la vie de coulisses, finies les pressions sur nos propres élus au Michelangelo et autres lieux de gourmandises. Que chacun de ces groupes parle et dise publiquement ses désirs, attentes ou projets; et que l'ensemble de nos élus et autres représentants de nos intérêts votent des lois au mieux-être de tous; et que la gouverne de l'État s'y conforme.  Ils seront au vu et au su de tous et devront se contenter de l'importance relative de leur propos respectif. Et nous nous en porterons mieux.

Oui, ce sera mieux pour le développement de la cité. Et vive la vraie politique! Notre « bon sens» prévaudra.



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